08/07/2025

La RSE au service la transmission

Les facteurs organisationnels, familiaux, psycho-sociaux et économiques de la mise en mouvement des entreprises familiales dans la transition environnementale et sociétale : La RSE au service la transmission

Les entreprises familiales, qui constituent une part essentielle du tissu économique français, sont confrontées à un double défi : assurer leur continuité familiale et s’adapter aux enjeux environnementaux et sociétaux. La Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) apparaît comme un levier stratégique potentiel mais son adoption varie d’une entreprise à l’autre.

La thèse examine l’intégration de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) dans les PME familiales en mettant en lumière son rôle dans la transmission intergénérationnelle et la pérennité in fine de ces entreprises. Elle questionne si la RSE est un levier stratégique favorisant la durabilité et l’adaptation aux enjeux environnementaux et sociétaux ou si elle est adoptée sous la pression des parties prenantes et des évolutions réglementaires.

Les problématiques soulevées portent sur les facteurs organisationnels, familiaux, psycho-sociaux et économiques qui influencent l’engagement des entreprises familiales dans la transition écologique et sociale. L’étude interroge également le rôle du dirigeant mais aussi des générations suivantes (Next Gen) dans l’impulsion de ces pratiques et leur impact sur la légitimité du successeur. Enfin, elle explore les freins et opportunités liés à la RSE, notamment son influence sur la gouvernance, la stratégie d’entreprise et la gestion du changement dans un contexte de transmission.

Le Dirigeant : Entre Héritage, Liberté et Vision à Long Terme

L’étude met en évidence que la figure du dirigeant est déterminante dans l’engagement RSE de l’entreprise familiale. Son rôle oscille entre la préservation de l’héritage et la liberté de transformer l’organisation. Deux profils se dessinent :

1.Le dirigeant visionnaire et transformateur : Convaincu que la RSE est un levier de compétitivité et de pérennité, il l’intègre dans la stratégie de l’entreprise. Il agit avec une vision à long terme et considère la transmission comme une opportunité pour renforcer l’impact sociétal et environnemental de l’entreprise.

2.Le dirigeant conservateur et pragmatique : Attaché au modèle économique existant, il voit la transmission comme une continuité plutôt qu’un moment de transformation sociétale et environnementale profond. Son engagement en RSE est souvent conditionné par des pressions externes (clients, réglementation, nouvelles générations).

Au-delà de ces profils, la question de la liberté du dirigeant joue un rôle clé. Lorsqu’il bénéficie d’une autonomie décisionnelle forte, il peut initier des changements ambitieux. En revanche, si des contraintes familiales ou économiques limitent sa marge de manœuvre, la RSE est souvent reléguée au second plan.

Cette recherche repose sur une méthodologie qualitative combinant une revue de littérature et une enquête empirique. Des entretiens semi-directifs ont été menés auprès :

  • 9 dirigeants et actionnaires de PME et ETI familiales avec des approches variées de la RSE.
  • 3 experts en RSE accompagnant ces entreprises dans leurs transitions.

Ces entretiens ont permis d’identifier les freins, les motivations et les stratégies d’intégration de la RSE dans le cadre d’une transmission.
 

L’étude met en évidence 5 enseignements clés :
 

1.La transmission comme moment critique : Lorsqu’elle est portée par un dirigeant visionnaire, sensibilisé et acculturé sur les sujets environnementaux, elle peut accélérer l’intégration de la RSE. À l’inverse, si elle est perçue comme une simple continuité, la transition vers des pratiques durables est plus lente, voire inexistante.

2.Un problème de vision à long terme : De nombreuses entreprises familiales ont du mal à se projeter au-delà d’un horizon de 10 ans, ce qui limite les décisions d’investissement en matière de durabilité. La priorité est souvent donnée aux impératifs économiques immédiats, au détriment des stratégies de transformation qui nécessitent une anticipation sur plusieurs générations.

3.Le rôle central de la liberté décisionnelle : Plus un dirigeant a de latitude dans ses choix stratégiques, plus il est enclin à intégrer la RSE. Dans certains cas, la pression des actionnaires familiaux limite la prise d’initiatives, ralentissant ainsi l’adoption de pratiques responsables.

4.Des résistances internes persistantes : Certaines entreprises perçoivent encore la RSE comme un investissement coûteux et non prioritaire. Un accompagnement spécifique interne dans les cas présentés est nécessaire pour démontrer son impact stratégique et économique.

5.La RSE comme facteur de pérennité : Lorsqu’elle est intégrée avec cohérence, la RSE devient un outil de résilience et de prospective renforçant la réputation, l’ancrage territorial et la transmission des valeurs familiales.

Ces travaux soulignent que l’intégration de la RSE dans les entreprises familiales dépend principalement de la posture du dirigeant, de sa capacité à se projeter dans le futur et de son niveau de liberté décisionnelle. Elle propose plusieurs recommandations pour faciliter cette transition et inscrire la RSE dans une dynamique durable et stratégique. Elle met en lumière un constat simple mais fondamental  pour certains dirigeants : la RSE, loin d’être une contrainte, relève d’abord du bon sens puis et s’impose comme un outil incontournable de la pérennité des entreprises familiales.

Auteur : Peggy Guibert - Diplômée Mastère Spécialisé Acteur pour la Transition Énergétique (MS APTE) – 2023-2024
Thèse professionnelle sous la direction du professeur Dan Scott Evans d'Audencia.

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