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Portrait expertise : Anaïs Angelucci
Anaïs Angelucci est doctorante à l'Université catholique de Louvain en Belgique et porte le sujet de la cognition entrepreneuriale dans le cadre de sa thèse et notamment les mécanismes cognitifs sous-jacents à la prise de décision des
Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Anaïs Angelucci, je suis doctorante et assistante de recherche & d’enseignement à l'Université catholique de Louvain en Belgique plus précisément à LouRIM (Louvain Research Institute in Management and Organizations). J’enseigne en finance et en audit mais je réalise ma thèse dans le domaine de l'entrepreneuriat.
Quel est ton sujet de thèse ?
Le sujet de ma thèse porte sur la cognition entrepreneuriale. Je vais m'intéresser aux mécanismes cognitifs sous-jacents à la prise de décision des entrepreneurs dans différents contextes : l'entreprise sociale, l'entreprise familiale et l'entrepreneur.
Pourquoi as-tu choisi ce sujet ?
Ce qui me passionne dans la cognition entrepreneuriale, ce sont toutes les disciplines qui s'emboîtent les unes avec les autres, des théories en psychologie à celles de l’entrepreneuriat en passant par la sociologie, l’économie, le management, la finance etc... On nous apprend toujours à penser d’une manière rationnelle, mais en réalité c’est différent. On ne peut pas penser et agir systématiquement comme des robots ! Nos émotions, nos affects, notre historique, l’éducation de nos parents, la culture de notre pays...tout ça rentre en ligne de compte dans notre décision. Et c'est d'autant plus important de les comprendre parce que les entrepreneurs, eux, n’ont pas toujours un filet de sécurité. Il faut donc les aider à mieux appréhender leur prise de décision pour éviter les erreurs cognitives qui peuvent les mener à l'échec entrepreneurial.
Et qu'est-ce qui t'a le plus étonné dans tes recherches ?
Je m'intéresse particulièrement à la théorie des focus régulateurs (TFR - Regulatory Focus Theory [RFT] ; Higgins, 1997, 1998) qui permet de mieux comprendre les processus mentaux mobilisés par les entrepreneurs lorsqu’ils définissent leurs buts et sélectionnent les moyens qu’ils considèrent comme les plus adéquats pour les atteindre (Brockner, Higgins et Low, 2004).
Il y a à la fois le focus régulateur de promotion ou « focus promotionnel » et le focus régulateur de prévention ou « focus préventif ».
Le premier principe est fondé sur le besoin de développement, le besoin d’accomplissement et la recherche d’avancement continu. Lorsque les individus sont régulés par un focus promotionnel, ils s’efforcent d’atteindre leurs idéaux, leurs souhaits et leurs aspirations. Ils sont en général préoccupés par la présence ou l’absence de résultats ou d’évènements positifs (gain/non gain) et favorisent des stratégies risquées pour y parvenir.
Le second principe est fondé sur le besoin de sécurité et la focalisation sur la sûreté et la responsabilité. Lorsque les individus sont régulés par un focus préventif, ils s’efforcent principalement de remplir ou respecter leurs obligations, leurs devoirs et leurs responsabilités. Ils sont en général préoccupés par la présence ou l’absence de résultats ou d’évènements négatifs (perte/non perte) et mettent en oeuvre généralement des stratégies vigilantes pour y faire face.
Et ce qui m'a surpris dans mes recherches, c'est que la littérature en entrepreneuriat est principalement mobilisée autour du Focus régulateur promotionnel au détriment parfois de l'approche préventive. Alors que c’est aussi un entrepreneur mais ayant d'autres techniques qui favorisent davantage la sécurité par exemple.
Pourquoi avoir choisi de travailler avec Miruna ?
Miruna travaille sur les mêmes domaines de recherche en entrepreneuriat et elle a aussi un doctorat en psychologie sociale. Je voulais donc écrire avec elle un papier de recherche sur la cognition entrepreneuriale et plus particulièrement sur le biais d'escalade des entrepreneurs, et on s'est dit qu'on pouvait l’appliquer également dans le cadre des entreprises familiales.
Est-ce que tu peux nous parler un peu plus du concept du “biais d'escalade des entrepreneurs” ?
Le biais d'escalade de l'engagement c'est la persistance dans une ligne de conduite considérée comme infructueuse. Ce sont les comportements qui perdurent dans l'échec ou qui l’aggravent parce que les entrepreneurs vont investir davantage de temps, d'argent alors qu’ils ont reçu des signaux qui indiquent que le projet devient défaillant.
En mobilisant la théorie des focus régulateurs La question est de savoir si un entrepreneur guidé par un focus régulateur promotionnel ou préventif, peut-il être davantage enclin au biais d'escalade ? Lequel des deux profils conduirait plus au processus d’escalade et pourquoi ? Quelles en sont les raisons ? C’est tout cela que je veux étudier sachant que naturellement les individus ont les deux focus régulateurs qui sont plus ou moins activés selon le contexte et l’éducation reçue dans la petite enfance.
Comment est venue ton idée de thèse ?
Pendant longtemps, je me suis intéressée à la théorie de la “Prospect Theory”, théorie des perspectives en français. La théorie des perspectives nous dit que, en état de gain, on ne va pas prendre forcément des risques mais dès qu'on va en état de perte, on va prendre des risques. On est plus à même à prendre des risques en état de de guerre par exemple. Oui c’est contre intuitif.
Ma tutrice de thèse m’a dit que la théorie des focus régulateurs permettait d’apporter un complément et des nuances à la théorie des perspectives. En effet, la théorie des focus régulateurs prédit qu’en état de gain, les individus promotionnels sont plus enclins à prendre des risques. Cependant, en états de pertes, les individus préventifs sont plus enclins à prendre des risques dans le but premier de restaurer le statu quo.
Par ailleurs, je m’intéresse beaucoup à la notion d’ «échec » car l’échec n’est pas considéré de la même manière selon la culture. Par exemple, aux Etats-Unis, il y a une forte culture de l’échec à travers laquelle on valorise les erreurs car elles sont considérées comme une source d’apprentissage. Dès lors, on peut associer cette culture à un focus promotionnel en raison qu’on préfère commettre une erreur plutôt qu’éviter de la commettre. A l’inverse, en Europe, l’échec à une connotation plutôt négative. Dès lors, on va minimiser les risques et être vigilants ce qui fait écho au focus préventif.
Selon moi, en raison des défis mises en reliefs par les nations-unies, il est donc important d’inviter les personnes à oser. Je dirai plutôt : “Il faut oser mais de manière dosée”.